L’action de l’État face aux violences conjugales
Tous les deux jours, une femme est tuée par son conjoint ou ex-conjoint en France. Selon l’étude de la Délégation aux victimes sur les morts violentes au sein du couple, 125 victimes ont été tuées par leur partenaire en 2020. Les victimes sont très majoritairement des femmes, elles étaient 102 en 2020 et 146 en 2019.
En Île-de-France, la répartition des victimes de violences conjugales est très hétérogène entre les différents départements, en moyenne pour 1000 habitantes, ce sont environ 6.1 femmes âgées de 20 ans ou plus qui sont victimes de ce type de violences pour l’année 2020.
Les départements franciliens figurent parmi les départements de France les plus touchés par les violences conjugales enregistrées par les forces de police et de gendarmerie. En Seine-Saint-Denis par exemple, pour 1000 habitantes ce sont 9,2 femmes qui sont victimes, 6.4 pour le Val-d’Oise, 6.3 en Essonne, ou encore 6.2 pour les Yvelines. La moyenne nationale étant de 2.4, cela sous-entend donc que la région est fortement exposée aux problématiques de violences conjugales.
Les violences conjugales peuvent se définir comme un processus inscrit dans le temps au cours duquel, dans le cadre d'une relation de couple (mariage - avec ou sans communauté de vie, concubinage, pacte civil de solidarité (PACSPacte civil de solidarité)), un partenaire adopte à l'encontre de l'autre des comportements agressifs, violents et destructeurs. Ces violences se développent le plus souvent de manière cyclique et progressive. En d’autres termes, à travers des crises de plus en plus intenses et de plus en plus fréquentes, entrecoupées de périodes de rémission de plus en plus courtes.
Les violences au sein du couple peuvent prendre différentes formes :
- Physique (coups avec ou sans utilisation d'objet, strangulations, séquestrations) ;
- Verbale (injures, menaces) ;
- Psychologique (humiliations) ;
- Sexuelle (agressions sexuelles ou viols) ;
- Matérielle (dégradations volontaires) ;
- Économique (spoliations, contrôle des biens essentiels, interdiction de travailler).
Pendant les périodes de confinement sanitaire liées à l’épidémie de la COVID-19, on a constaté une forte augmentation des violences conjugales. Les appels vers le 3919 (numéro d’écoute national pour les femmes victimes de violences) ont fortement augmenté durant cette période, entre le 16 mars et le 11 mai 2020 c’est plus de 44 235 appels qui ont été recensés.
Par ailleurs, les violences conjugales ont des conséquences graves et durables sur les enfants qui sont directement victimes ou témoins de ces violences. Ces derniers peuvent alors être exposés à de l’agressivité, à des crises d’angoisse, ou bien encore à de l’échec scolaire.
Certains enfants se sentent même responsable et peuvent reproduire ces situations à l’âge adulte. Ainsi, un consensus scientifique se dégage pour confirmer les différents effets suivants sur les enfants :
- Un état de stress post-traumatique ;
- Un psychotraumatisme développemental (ou trauma de type II, s’étalant sur une longue période et perturbant la construction identitaire) ;
- Des troubles anxio-dépressifs ;
- Des problèmes de santé (retard de croissance, troubles psychosomatiques) ;
- Une perturbation du fonctionnement cognitif (troubles de l’attention, des apprentissages) ;
- Des troubles du comportement (agitation, auto ou hétéro agressivité, conduites addictives à l’adolescence) ;
- Des difficultés scolaires.
Toutes les violences conjugales sont interdites par la loi, qu'elles visent un homme ou une femme, qu'elles soient physiques, psychologiques ou sexuelles. Les victimes de ces violences qui signalent les faits bénéficient de nombreuses mesures de protection de la part des institutions publiques et des associations.
Ces mesures peuvent même s'étendre aux enfants. De plus, selon l’article 434-3 du code pénal, modifié par LOI n°2016-297 du 14 mars 2016 - art. 46 : « le fait, pour quiconque ayant eu connaissance de privations, de mauvais traitements ou d’agressions ou atteintes sexuelles infligés à un mineur ou à une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge, d’une maladie, d’une infirmité, d’une déficience physique ou psychique ou d’un état de grossesse, de ne pas en informer les autorités judiciaires ou administratives est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende ». https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000037289453/
Des mesures pour renforcer la protection des victimes et le suivi des auteurs de violences conjugales
Le ministère de l’intérieur a adopté de nombreuses mesures et dispositifs afin de garantir une protection et un accompagnement personnalisé aux victimes de violences conjugales ainsi qu’un suivi des auteurs de ces violences,. Parmi ces mesures, on retrouve :
- Déploiement de 3 000 téléphones grave danger ;
- Renforcement du recours aux bracelets anti-rapprochement ;
- Contrôle des acquisitions et détentions d’armes ;
- Création d’un fichier des auteurs de violences conjugales ;
- Renforcement de la gouvernance locale de la politique de lutte contre les violences conjugales ;
- Renforcement de la mission interministérielle en faveur de la protection des femmes victimes de violences.
Pour assurer dans l’urgence la protection des victimes de violences conjugales ou intrafamiliales, le juge aux affaires familiales peut recourir à l’ordonnance de protection.
Créée en 2010, ce dispositif n’a pas pour objet la condamnation de l’auteur mais la protection de la victime, en application du principe de précaution. Il a deux objectifs dont l’accompagnement de la victime dans le parcours de sortie des violences en lui permettant d’obtenir des mesures d’éloignement du défendeur et des mesures relatives aux enfants et à l’attribution du logement ainsi que la protection de la victime de violences conjugales en lui accordant des mesures de protection judiciaire.
Une messagerie instantanée (chat) est également mise à disposition de la victime afin de dialoguer avec un personnel de police ou de gendarmerie. L'historique de discussion pourra être effacé de votre ordinateur, téléphone portable ou tablette. https://www.service-public.fr/cmi
Pour ce qui est des actions en Île-de-France, on note que d’après le dernier recensement régional du 30 décembre 2020, la région compte 2 274 places d’hébergement pour les femmes victimes de violences dont 1865 en CHRSCentre d'hébergement et de réinsertion sociale (centres d'hébergements et de réinsertion sociale) et CHU (centres d'hébergements d'urgence), 340 en ALT (allocation logement temporaire) et 65 en résidence sociale, soit 2 470 places si on compte les 200 places dites « hivernales ».
D’après la DRIHL, le parc hébergement et de logement situé à Paris se compose au 22 novembre 2021 de 516 places dédiées aux femmes victimes de violences.
- 355 places FVV dont 257 en CHRSCentre d'hébergement et de réinsertion sociale et 98 en CHU ;
- 98 places dédiées aux personnes victimes de prostitution (dont 62 en CHRSCentre d'hébergement et de réinsertion sociale et 36 en CHU) ;
- 22 places en ALT ;
- 41 en résidence sociale.
Par ailleurs, dans le cadre de l'appel à projets national 2020 : 7 projets franciliens ont été retenus permettant l’ouverture de 130 places supplémentaires en 2020 (91 HU et 39 ALT) dont 45 à Paris, portant le parc francilien dédié à 2 168 places.