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Algues vertes en Bretagne : l’État prend acte du jugement du tribunal administratif

Mise à jour : 18 juillet 2023

Le tribunal administratif de Rennes, en date du 18 juillet 2023 a rendu des jugements visant le dispositif réglementaire mis en place en 2021 sur les bassins versants concernés par les échouages d’algues vertes sur plages. Pour lutter contre les pollutions par les nitrates d’origine agricole dans ces bassins versants particulièrement sensibles, six mesures complémentaires avaient été ajoutées au programme d’actions régional (PAR) arrêté en 2018, pour une meilleure maîtrise de la fertilisation azotée et de gestion adaptée des terres agricoles. L’État prend acte de ce jugement et va apporter les réponses nécessaires, tout en poursuivant, à travers les différents dispositifs existants, son action de lutte contre les algues vertes, enjeu majeur en Bretagne.

Malgré d’incontestables signes d’amélioration, la Bretagne reste vulnérable face aux nitrates

La Bretagne est classée en « zone vulnérable » vis-à-vis du paramètre nitrates depuis 1994. En application de la directive européenne « nitrates » et de la directive-cadre sur l’eau, les services de l’État en région mettent en place des programmes d’actions régionaux (PAR) qui complètent le cadrage national en précisant, de manière proportionnée et adaptée à chaque territoire, les mesures nécessaires à l’atteinte des objectifs de reconquête de la qualité des eaux, s’agissant de la pollution par les nitrates.
 
 Grâce au renforcement de la réglementation, à la forte mobilisation des acteurs locaux, aux moyens financiers, et à l’amélioration des pratiques agricoles, la teneur en nitrates a baissé de façon significative avec une baisse de 31 % entre 1995 et 2020 sur le réseau de suivi lié à la directive cadre sur l’eau (cf. graphique ci-dessous). Les teneurs en nitrates dans les cours d’eau ne baissent plus cependant ces dernières années et restent à des niveaux encore importants. Cette situation peut avoir des conséquences multiples sur les milieux comme l’eutrophisation (1) des écosystèmes, à l’origine de la prolifération des algues vertes.

Des renforcements récents de la réglementation dans les « baies algues vertes »

Le 18 novembre 2021, le préfet de la région Bretagne a signé un arrêté imposant plusieurs mesures réglementaires spécifiques s’appliquant aux agriculteurs exerçant leur activité dans les huit « baies algues vertes » bretonnes. Cet arrêté visait à répondre à la fois au jugement du Tribunal Administratif de Rennes, daté du 4 juin 2021, et aux recommandations de la Cour des comptes, figurant dans un rapport publié le 2 juillet 2021.
 
 Les 9 et 12 septembre 2022, les préfets des Côtes-d’Armor et du Finistère ont conformément au programme d’action régional et après une phase de co-construction signé des plans d’action (arrêtés ZSCE – zone soumise à contraintes environnementales) listant un ensemble de mesures volontaires à l’attention des agriculteurs pour réduire les flux d’azote arrivant aux cours d’eau. Ces mesures sont actuellement en cours de mise en œuvre sur les territoires concernés et sont susceptibles de devenir obligatoires, à titre individuel pour les agriculteurs n’ayant pas atteint les indicateurs et objectifs fixés, à l’issue d’une évaluation réalisée en 2025.

Un 3e plan de lutte contre les algues vertes mobilisant 130 M€ qui inclut un nouveau volet sanitaire

En plus du volet réglementaire, des leviers financiers ont été activés au travers du plan régional de lutte contre les algues vertes (2), dont les financeurs (État, Région, agence de l’eau Loire Bretagne, Départements des Côtes d’Armor et du Finistère, collectivités locales concernées, chambre d’agriculture, agence régionale de santé) ont doublé leur contribution pour la période 2022-2027 avec un montant de 130 millions d’euros.
 Les aides financières sont fléchées en priorité et majoritairement autour de dispositifs de soutien spécifiques aux agriculteurs, permettant de les accompagner dans la transition agro-écologique (mesures agro-environnementales et climatiques, paiements pour services environnementaux, financement d’animation par les collectivités locales et de conseils ou diagnostics pour les agriculteurs notamment). Ce renforcement des dispositifs incitatifs doit contribuer à atteindre les objectifs de long terme de réduction des apports en nitrates dans les cours d’eau.
 
 L’État prend en charge les frais de ramassage des algues vertes dans le cadre d’un volet curatif, destiné à maîtriser les dangers liés à la décomposition des algues sur les plages.
 
 Par ailleurs, suite à la publication de l’avis du Haut conseil de santé publique de décembre 2021 complété en février 2022, un nouveau volet sanitaire a été mis en place avec l’ARS de Bretagne, comprenant une surveillance du risque d’exposition à l’hydrogène sulfuré via un réseau de capteurs installés à proximité de zones d’échouage d’algues vertes à risque de putréfaction (non ramassables). Un dispositif d’alerte est opérationnel pour rendre ces zones inaccessibles en fonction de la concentration mesurée, avec une information des populations susceptibles d’être exposées aux émanations de ce gaz toxique, ainsi qu’une sensibilisation des professionnels de santé des secteurs potentiellement concernés par ce risque. Ce nouveau volet comporte également des protocoles d’intervention lors de situations susceptibles de porter atteinte à la santé humaine ou animale liées à l’hydrogène sulfuré.

Jugement du tribunal administratif sur le dispositif réglementaire renforçant les mesures sur les « baies algues vertes »

Dans le cadre de deux contentieux qui opposaient respectivement Eau et Rivières de Bretagne et la FRSEA à l’État sur le dispositif réglementaire renforcé de novembre 2021 visant les « baies algues vertes », le tribunal administratif de Rennes a rendu son jugement le 18 juillet 2023.
 
 Les deux décisions actent l’annulation de l’arrêté modificatif du PAR 6 à compter du 18 novembre 2023, sans effet rétro-actif, et enjoignent de prendre sous 4 mois de nouvelles mesures limitant la fertilisation azotée dans les baies algues vertes.
 
 Les services de l’État examinent les conditions d’un éventuel appel de ces jugements.
 
 En l’attente, l’État prend acte des conclusions de ce jugement dans le processus de révision du plan d’action régional Nitrates breton N°7 qui était en cours, en renforçant les mesures de protection spécifiques aux « baies algues vertes » selon des modalités qui seront définies avec les partenaires de ce plan.

Ce jugement ne remet pas en cause les mesures :

  • figurant dans l’arrêté du plan d’actions régional nitrates du 2 août 2018
  • du 3e plan de lutte contre les algues vertes 2023-2027 ;
  • des arrêtés zones soumises à contraintes environnementales (ZSCE), établis par les préfets des Côtes-d’Armor et du Finistère pour chaque baie algues vertes.

(1) Déséquilibre du milieu caractérisé par une surproduction végétale aquatique en lien avec une augmentation des apports en nutriments, notamment azote et phosphore.
(2) Pour plus d’informations : https://www.algues-vertes.com/le-plan-de-lutte/4-volets/